lundi 5 octobre 2009

Le baron noir

Il aurait pu.
Il aurait pu s’avouer amoureux et dépressif à cause de moi,
Il aurait pu danser le tango sur le 21ème air d’Orphée et Eurydice au milieu de la rue en pleine nuit parce qu’il était content d’être avec moi,
Il aurait pu ne pas m’avoir choisie pour l’accompagner au concert, m’avoir plantée à la moitié de la symphonie et ne pas avoir plus insisté pour que je reste vivre avec lui parce qu’il avait les pieds froids,
Il aurait pu ne pas avoir voulu rentrer à pied simplement parce qu’il était très fatigué,
Il aurait pu m’avoir montré les endroits préférés les plus glauques alors qu’il n’y a jamais emmené personne d’autre,
Il aurait pu m’emmener manger un curry brûlant, des dim sum dans un immense restaurant vide à 11h du matin, de la purée de maïs dans un snack péruvien caché dans un shopping désaffecté, partager une mousse au chocolat autrichienne dans le bar d’un musée surpeuplé pour me tester,
Il aurait pu venir Là-bas pour rencontrer mon Bon-papa et prendre l’avion avec moi,
Il aurait pu me demander ce que je pense de ses nouveaux pantalons taillés sur mesure dans du lin italien et de ses cadres en bois parce qu’il trouve que j’ai bon goût,
Il aurait pu ne pas répondre à mes questions et rester souvent silencieux parce qu’il pense à la même chose que moi ou qu’il sait qu’il n’a pas besoin de parler quand il est avec moi,
Il aurait pu avoir voulu m’emmener au restaurant argentin ou au thaï funèbre parce qu’il aime ma compagnie,
Il aurait pu être vraiment jaloux de ce rouge à lèvre quand j’ai enlevé mon manteau et que je lui ai montré ma nouvelle robe bleue que j’avais mise pour Tom,
Il aurait pu m’appeler pour redécorer son appart parce qu’il n’avait pas de meilleur prétexte pour me revoir,
Il aurait pu me prêter ses baffles, son i-pod et son lit parce que c’est moi,
Il aurait pu vouloir échanger nos musiques pour mieux se connaître,
Il aurait pu n’oser s’énerver que je n’aie pas mis de sac dans la poubelle ou la cafetière sur la bonne taque, m’ordonner de venir que parce que -encore- c’est moi,
Il aurait pu vraiment aimer entendre ma voix au téléphone,
Il aurait pu me dire que ses amis trouvent que je l’ai changé en le pensant lui aussi,
Il aurait pu attendre pour du vrai cette fille qui aime le vin rouge et qui allait l’appeler, dans son lit, un verre à la main et ne pas parler de ce coup de téléphone qui a suivi parce qu’il était troublé
Il aurait pu ne pas écouter Tatu et Placebo, ni aimer la rhubarbe par hasard,

Mais il aurait pu mentir en disant qu’il était amoureux et dépressif ou l’être pour une autre, danser parce qu’Eurydice ou Hélène le rendait content, ne pas avoir besoin de moi pour l’accompagner au concert ou pour occuper la chambre, m’avoir emmenée dans ses endroits préférés parce que je n’avais rien d’autre à faire et qu’il ne voulait pas y aller seul, venir Là-bas pour rencontrer des filles, faire appel à mes goûts parce qu’un avis féminin est toujours indispensable, laisser des blancs parce qu’il s’ennuie, m’inviter au restau parce qu’il avait faim, blaguer sur le fait qu’il pourrait devenir jaloux, avoir besoin d’une bonne fille pour pendre ses cadres et faire son lit, me prêter ses affaires comme il fait avec n’importe qui, avoir envie de découvrir des nouveaux morceaux, être un petit dictateur frustré, un dragueur assez banal.



Ajvar

une dizaine de gros poivrons rouges
8 c.à s. d'huile d'olive
sel
1 c. à s. de paprika en poudre
1/2 c. à c. de poivre de cayenne
piment d'espelette
3 pincées de cannelle
1 pointe de couteau de la Chinata (poudre de parika fumée)
.
Couper les poivrons en 4. Epépiner et enlever la queue.
Placer les sur le ventre sous le grill. Quand ça sent le brûlé et que la peau est noire et pète, les sortir du four. Laisser refroidir un peu puis arracher la peau.
Peser 700 gr de chair de poivron et hâcher menu.
Faire cuire à feu doux en remuant bien (pour retirer toute l'humidité) sinon ça brûle.
Ajouter 1 à 2 c. à s. d'huile d'olive et re-remuer.
Ajouter les épices, le sel, le poivre.
Rajouter le reste de l'huile petit à petit, tout en remuant régulièrement. Laisser sur le feu une demi-heure à une heure. Et toujours, remuer, remuer...
Mettre en pot. Et manger sur de l'agneau rôti ou un morceau de parmesan. Ou sur du pain avec du saucissson à 3h du matin juste avant la gueule de bois.

4 commentaires:

Thérèse a dit…

Que j'entends tes papotages...
Tu as des échos accrocheurs pour raconter des bribes de vie.
J'aime bien te lire!

patoumi a dit…

Je suis jalouse.
Tes histoires sont trop bien.

Miss Popote a dit…

C'est pourtant une histoire très triste... J'en pleure encore.
Merci pour votre réconfort!

(les chéchés) a dit…

je suis d'accord avec patoumi. tes histoires sont trop bien. et tes illustrations aussi. (je suis jalouse, surtout).
j'espère que tout va mieux...